Nicole Concordet, architecte et bâtisseuse de liens
Tout en préservant l’identité historique des lieux, Nicole Concordet propose une architecture brute, des friches artistiques aux contours flous où espace intérieur et extérieur se confondent. Des réalisations en accord avec ceux qui l’habitent et l’utilisent où la « maîtrise d’usage » est le maître-mot. Des réalisations qui frappent fort et marquent les esprits. Sans le savoir, vous avez sûrement partagé un moment de vie et de culture dans une des œuvres de Nicole Concordet.
L’architecture, c’est la Haute Qualité Humaine (HQH) d’un projet où tous les acteurs du chantier sont associés au plaisir de l’acte de construire.
Quel est le point commun entre la Machine et le Lieu Unique à Nantes (44), la Piscine de Bègles (33), le Théâtre de Gennevilliers (92) ou le Confort Moderne à Poitiers (86) ?
Un nom et une vision, celle de l’architecte Nicole Concordet
Née à Chicago en 1967, Nicole Concordet a grandi à Paris. Initialement architecte d’intérieur, elle se forme sur le terrain avec l’atelier CONSTRUIRE, fondé par Patrick Bouchain et Loïc Julienne. Ensemble, ils réalisent le siège social de Thomson Multimédia à Boulogne-Billancourt (1997), transforment les anciennes usines LU à Nantes en espace culturel, le Lieu Unique (2000).
De ce projet, un travail de scénographe, proche de l’architecture, Nicole Concordet le confirme : « la frontière entre architecture d’intérieur et architecture devient poreuse ». L’équipe est aussi convaincue du potentiel civique des citoyens pour participer à son élaboration. Dans un hors-série Construire Ensemble, le Grand Ensemble, ils définissent ainsi leur architecture : « C’est la Haute Qualité Humaine (HQH) d’un projet où tous les acteurs du chantier sont associés au plaisir de l’acte de construire. »
En 2000, Nicole Concordet passe le diplôme d’architecte DPLG « pour avoir la liberté de construire ». C’est lors de la rénovation de la piscine de Bègles et de son bâtiment Art Déco qu’elle s’installe définitivement à Bordeaux, en 2006.
Très souvent, ses projets partent d’enclaves industrielles, dont l’architecte conserve la structure initiale. Au cœur de son travail, l’utilisation de matériaux simples efface les frontières entre espace intérieur et espace extérieur. Son moteur ? Répondre à des projets à valeur culturelle et avec des équipes pluridisciplinaires. Lors du projet de réhabilitation du Confort Moderne : « conçu en tricotant avec le déjà-là, la salle de concerts, l’entrepôt-galerie et les installations artistiques pérennisées sur le site » avec son équipe et Guillaume Chiron, elle propose un atelier Fantaisier. Mené par Simon Nicaise avec les élèves du collège et du lycée Camille Guérin (Poitiers), ce projet s’intéresse aux marques, visibles ou cachées, laissées par les artisans sur un bâtiment lors de sa construction.
Tout projet doit être inclusif, chaque personne doit pouvoir participer avec ses moyens.
Maîtrise d’usage et dialogue avec les citoyens
Dès les phases d’étude, Nicole Concordet donne une grande importance aux moments de dialogue avec ce qu’elle appelle la maîtrise d’usage (les usagers, les habitants). Si elle déteste le mot de « co-construction » qui selon elle, « fait passer à côté des vraies relations entre les gens. Le participatif, cela ne se décrète pas et ne se programme pas. Tout projet doit être inclusif, chaque personne doit pouvoir participer avec ses moyens. ». Elle essaye de mettre en place des dispositifs simples, elle propose une écoute et un échange avec les habitants des lieux lors de repas de chantier où tout le monde est invité à donner son avis.
Résultat : elle ravit les usagers avec ses propositions de Tiers Lieux et de friches artistiques, des lieux hybrides culturels où se côtoient plusieurs fonctions : espace de concert, lieu d’expositions, librairie, restaurants… qui facilitent les échanges.
Sur le Lieu Unique, l’architecte revient dix ans après pour un réagencement du bar-restaurant, du bureau d’accueil, de la librairie… Un nouveau regard sur son travail, que Nicole Concordet semble apprécier : « Il ne nous est pas souvent donné la possibilité de venir réinterroger un travail fait des années auparavant, et de réactualiser son regard sur ces espaces. C’est la démonstration que le lieu est mouvant et donc bien vivant, que l’architecture n’est jamais finie. »
Autant de bâtiments emblématiques et une vision de l’architecture qui viennent d’être récompensés en 2018 par le Prix Femmes architectes, décerné par l’ARVHA (Association pour la Recherche sur la Ville et l’HAbitat).